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Löic


Löic est un trentenaire qui travaille dans une agence immobilière depuis de nombreuses années.
Il est apprécié et bien vu par le directeur et ses collègues pour son professionnalisme et son intégrité.
Il accorde une grande importance à son apparence et s’habille toujours avec goût et attention aux détails, que ce soit une paire de chaussures, une chemise ou une veste élégante.

Plutôt réservé, il n’aime pas parler de sa vie en dehors du travail et participe rarement aux apéritifs entre collègues. Cependant, il raconte souvent ses voyages aventureux dans de magnifiques endroits avec de petits groupes de participants.
À l’agence, ses collègues ne savent pas s’il a une petite amie ou si, peut-être, il est si réservé parce qu’il ne veut pas que l’on sache qu’il est homosexuel.

Quoi qu’il en soit, Löic travaille avec d’excellents résultats et gagne bien sa vie, un salaire amplement mérité.
Un jour, un de ses collègues aperçoit sur son bureau un médicament utilisé pour perdre du poids.
Naïvement, il lui demande pourquoi il en prend, étant donné que Löic est visiblement en forme et qu’il n’a certainement pas un gramme de graisse en trop.

Löic semble très contrarié par cette question, ne sait pas trop quoi répondre et se montre plutôt agressif envers son collègue.
D’autres collègues, témoins de la scène par hasard, tentent d’apaiser l’atmosphère, mais Löic est bouleversé, vexé, et quitte soudainement l’agence sous le regard stupéfait de ses collègues.

Martine, une collègue peinée par ce qui vient de se passer, le suit pour le rassurer, mais elle est repoussée et reçoit des paroles désagréables…
À l’agence, tout le monde est choqué et attristé par l’incident, un véritable coup de tonnerre dans un ciel serein.

Le lendemain, Löic ne vient pas travailler, il se déclare malade et ne répond ni aux appels de son patron ni à ceux de ses collègues.
En réalité, il reste “en arrêt maladie” pendant une semaine, laissant ses collègues de plus en plus perplexes et inquiets.

Lorsqu’il revient au travail, personne ne fait allusion à l’incident, et bien sûr, lui non plus.
Martine, qui l’avait suivi hors du bureau, ne parvient pas à faire comme si de rien n’était et, avec douceur, lui parle pour essayer de comprendre et de lui offrir son amitié sincère.

Ils se retrouvent le soir dans un bar, et Löic, les yeux humides, lui avoue qu’il va très mal. Il ne veut pas montrer sa faiblesse aux autres, mais il n’en peut plus et éclate en sanglots.
Martine est bouleversée et comprend alors la grande souffrance que Löic a toujours cachée.

Avec beaucoup de délicatesse, elle attend qu’il poursuive et révèle enfin la raison d’une telle détresse : elle apprend ainsi que le jeune homme est anorexique depuis de nombreuses années.
Il mange toujours les mêmes deux ou trois aliments et ne fait jamais d’écart.
De plus, il va très souvent à la salle de sport pour brûler des calories et, depuis quelques semaines, il a réussi à obtenir d’un médecin une prescription de médicaments “pour maigrir” car il se perçoit comme étant gros !

Il devient alors évident pourquoi Löic avait un comportement si “étrange”, pourquoi il gardait son secret au bureau et pourquoi il semblait toujours si distant et froid.

Martine s’inquiète pour lui et lui propose des pistes pour accéder à des consultations ou des groupes de soutien afin d’affronter la souffrance qui lui gâche la vie.
Sur Internet, Martine trouve Soremax, qui lui semble être une opportunité pour Löic de commencer à faire face à sa douleur et d’être aidé par d’autres personnes.

Löic assiste à un premier entretien, accompagné de Martine, qui se révèle être une véritable amie et un réel soutien pour lui.
Très vite, on remarque que Löic ne consomme que deux ou trois types d’aliments, totalement inadaptés pour lui apporter les vitamines, les calories et les nutriments essentiels dont un jeune homme a besoin.
Il se perçoit comme étant gros et cherche en permanence à perdre du poids, que ce soit par le sport, par une alimentation stricte proche d’un “régime de prisonnier de guerre”, ou plus récemment par des médicaments qui lui causent des effets secondaires tels que de violents maux de tête.

La situation est très complexe, mais d’une certaine manière, Löic a enfin brisé son secret avec Martine, qui est bien décidée à faire quelque chose pour l’aider, le sentant humainement fragile et en détresse.

Notre approche privilégie ici l’aspect de la nutrition et de l’alimentation, qui sont pour Löic synonymes de poison, de rejet et de risque de grossir, alors qu’il se perçoit déjà en surpoids.
Le test PCS, que nous lui proposons, nous fournit de nombreuses informations sur les liens entre les aspects psychologiques et les émotions associées à la consommation de certains aliments ou non.

Ce premier contact nous aide à amener Löic à redécouvrir les aliments sous l’angle du goût, des couleurs, des parfums, des associations et des modes de cuisson, afin de réveiller des souvenirs et des émotions bien ancrés dans son esprit, qu’ils soient négatifs ou positifs.

Un premier pas pour essayer de mettre de l’ordre dans le désordre total qu’entretient Löic avec la nourriture, sans compter les calories et les sucres, mais en valorisant l’aspect sensoriel du fait de manger.

Löic reste très sceptique, mais il sait qu’il est dans une impasse et qu’il doit faire quelque chose, faire confiance à quelqu’un.

En quelques mois, Löic commence à goûter des aliments qu’il n’avait pas mangés depuis des années, il abandonne les médicaments “pour maigrir” et parvient à réduire son obsession pour l’entraînement intensif en salle de sport.
Le travail sensoriel autour de la nourriture est accompagné de séances psychologiques, pour lui permettre d’exprimer son angoisse et de le soutenir dans ce parcours difficile, en ayant conscience que lorsqu’on touche le fond, on ne peut que remonter !

Nous utilisons également d’autres tests psychologiques afin d’explorer son passé familial et son histoire, pour l’aider à revoir et à reconnaître l’origine de cette souffrance qu’il a cachée aux autres pendant tant d’années.

Le travail est en cours, et Martine reste toujours très présente aux côtés de Löic, lui apportant un soutien sincère et précieux.
Les plus malveillants murmurent que les deux auraient commencé une relation, qu’ils se voient sans arrêt et forment désormais un couple…


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Céline et Carla


Céline, une jeune fille de dix-sept ans, nous consulte car elle est très inquiète pour sa petite sœur de deux ans sa cadette, Carla, qui depuis quelques mois mange très peu et sans appétit. Céline découvre ensuite que Carla cache de la nourriture dans sa chambre, pour ensuite la jeter discrètement. Les deux sœurs s’entendent très bien et sont complices dans ce qu’elles font. Carla demande à Céline de ne rien dire à leurs parents à propos de son alimentation et de garder le secret.

Leurs parents parlent peu avec leurs filles, tous deux travaillent beaucoup afin de ne manquer de rien à la maison, surtout le père qui fait des heures supplémentaires pour assurer un niveau de vie plus élevé à toute la famille.
Évidemment, Céline est déchirée entre le respect de la volonté de sa sœur et l’inquiétude face à un comportement qu’elle sait potentiellement dangereux.

Pendant plusieurs mois, la situation continue ainsi, jusqu’au soir où Carla rentre ivre à la maison.
Les parents ne semblent pas y prêter attention, tandis que Céline est extrêmement préoccupée pour sa sœur et ne sait pas quoi faire.
Elle est surtout stupéfaite du fait que ses parents ne semblent rien remarquer : ils parlent peu avec leurs filles et ne semblent s’intéresser qu’à leurs résultats scolaires, qui, soit dit en passant, sont excellents pour toutes les deux.

Céline demande un entretien à l’infirmière de l’école (que les deux sœurs fréquentent) afin d’obtenir un conseil et mieux comprendre comment agir avec Carla.
L’infirmière lui propose de rencontrer Carla en toute confidentialité pour discuter et essayer d’aborder sa souffrance.
Carla refuse, elle est même en colère contre Céline qui a « brisé » le secret qu’elle lui avait demandé de garder.

Céline se retrouve donc au point de départ : elle ne sait plus quoi faire, et Carla est maintenant fâchée contre elle d’avoir parlé de sa détresse à une « étrangère » à l’école.

Puis, l’état de Carla s’aggrave : elle mange de moins en moins et fait des exercices de step pour brûler des calories, sous l’indifférence quasi totale de ses parents.
Céline ne peut plus faire semblant. Elle affronte ses parents alors que Carla est absente et les accuse d’être totalement aveugles et sourds à la détresse de leur fille ainsi qu’à son immense inquiétude, elle qui semble être la seule à avoir conscience de ce qui se passe dans la famille !

Sur les conseils de l’infirmière scolaire, Céline contacte Soremax pour obtenir de l’aide.
Nous la rencontrons et la trouvons réellement préoccupée (et en colère), car elle a le sentiment d’être la « mère » de Carla, alors que leurs vrais parents semblent peu conscients de ce qui se passe dans la famille.

La situation est complexe : Céline se retrouve coincée, mais elle refuse de détourner le regard tandis que sa sœur dépérit sous les yeux de parents « absents » et irresponsables.
Avec son accord, nous lui proposons de convoquer les parents afin d’exprimer son inquiétude pour Carla et d’évaluer leur capacité à percevoir la souffrance de leur fille cadette ainsi que le risque d’un trouble anorexique chez une adolescente.
Le père refuse de nous rencontrer ; seule la mère se présente, mais dans une posture très défensive.

Avec beaucoup d’attention et de délicatesse, nous essayons de comprendre à quel point la mère est consciente de la souffrance de Carla, et nous découvrons (!) qu’elle a elle-même souffert d’anorexie pendant une longue période, entre son adolescence et les premières années de son mariage.
À l’époque, cela entraînait de violentes disputes avec son mari, qui menaçaient leur relation : il avait exigé qu’elle prenne du poids et retrouve un cycle menstruel régulier pour pouvoir tomber enceinte.
Ainsi, sous cette contrainte, la mère avait repris du poids, et Céline était née, suivie de Carla deux ans plus tard.
Le mari, avec sa vision simple et rationnelle, a toujours pensé que ne pas manger était un caprice de femmes pour rester minces et en forme.

Les entretiens suivants deviennent beaucoup plus « authentiques » : la mère montre qu’elle comprend bien Carla et sa souffrance, car elle l’a elle-même vécue des années auparavant.
Elle nous confie qu’elle a souvent essayé d’en parler à son mari, mais qu’il refuse d’écouter, persuadé qu’il suffit de vouloir pour manger et prendre du poids, sans créer de drame familial.
Pire encore, il accuse sa femme d’avoir « contaminé » leur fille avec cette histoire d’anorexie.

Le cadre familial est donc très complexe et difficile à gérer, d’autant plus que Carla réalise désormais que tout le monde est au courant de son trouble alimentaire, ce qui la rend encore plus angoissée et en colère.
Pour poursuivre notre travail, nous devons compter sur un minimum d’« alliance thérapeutique » avec la mère, qui connaît bien la souffrance anorexique et qui, d’une certaine manière, a déjà tenté de protéger sa fille, bien que de manière ambivalente.

Nous devons rencontrer la mère à plusieurs reprises pour la rassurer : notre but n’est pas de la culpabiliser, mais plutôt de lui montrer qu’elle est, pour l’instant, la seule personne capable d’aider réellement Carla en tant que parent.
Il va de soi qu’elle doit aussi affronter son mari et le « forcer » à au moins une rencontre avec Soremax.

Avec difficulté, le rendez-vous a finalement lieu et, contre toute attente, Carla souhaite être présente pour « …Dire ce qu’elle a à dire en personne ».
La rencontre est très tendue, comme on peut l’imaginer. Carla explose plusieurs fois et s’en prend à son père, et tant qu’à faire, aussi à sa mère…
La mère finit par parler à ses filles de son anorexie avant leur naissance, ce qui surprend particulièrement Carla.

Nous devons alors jouer le rôle d’« arbitres » de ce conflit familial, dans l’espoir de faire émerger une prise de conscience une fois que la colère de chacun sera retombée.
Nous hésitons à proposer d’autres rencontres en groupe ou séparément, mais nous décidons de tout miser sur une rencontre familiale complète.
Le père se sent « attaqué » par ses trois femmes et menace de quitter la maison.

Effectivement, il part chez son frère pendant quelques jours, mais il se rend vite compte qu’il ne peut pas rester loin de sa femme et de ses filles : il se sent perdu, seul et incomplet !
L’angoisse de cette séparation le pousse à revenir aux entretiens familiaux avec une meilleure disposition à écouter.
Il commence surtout à comprendre que ne pas manger n’est pas une simple question de « rester mince », mais que cela cache des émotions et une souffrance profonde.
C’est un premier pas pour le père, qui rentre chez lui et est accueilli avec tendresse par « ses femmes », qui veulent lui faire comprendre à quel point il est important pour elles, mais aussi qu’il doit apprendre à écouter et à parler avec elles de leurs émotions, de leurs désirs et de leurs difficultés, au lieu de se renfermer sur lui-même.

Le travail de prise de conscience est en cours : la mère peut désormais être beaucoup plus proche de Carla, Céline retrouve son rôle de fille, et le père comprend enfin son importance au sein de sa famille.

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Parents et TCA

Quand l’impuissance s’invite : le combat des parents face aux troubles alimentaires de leur enfant

Lorsqu’un enfant est touché par un trouble du comportement alimentaire (TCA) comme l’anorexie ou la boulimie, c’est toute la famille qui vacille. Les parents, souvent démunis, se retrouvent confrontés à une situation qu’ils ne comprennent pas toujours, nourrissant un sentiment d’impuissance et d’échec profond. Entre la peur de mal faire et l’incapacité à communiquer, ils vivent une véritable épreuve émotionnelle.

L’impuissance et la culpabilité : un fardeau invisible

Un trouble alimentaire n’est pas une simple phase ou un caprice. Pourtant, nombreux sont les parents qui, au début, espèrent qu’il ne s’agit que d’un passage temporaire. Lorsqu’ils réalisent l’ampleur du problème, la culpabilité s’installe. “Ai-je mal agi ? Ai-je transmis une mauvaise image du corps et de l’alimentation ? Suis-je responsable ?” Ces questions hantent l’esprit des parents, les enfermant dans un cercle d’auto-reproches.

Face au refus de s’alimenter ou aux comportements compulsifs, ils tentent tant bien que mal d’intervenir, mais souvent, leurs efforts semblent vains. L’enfant rejette l’aide, s’enferme dans le silence, et chaque tentative de discussion devient une épreuve. L’impuissance devient alors accablante : comment venir en aide quand l’autre refuse d’être aidé ?

Une communication rompue : le mur du silence

Les troubles alimentaires ne se résument pas seulement à l’assiette, ils expriment une souffrance plus profonde. Mais pour un parent, il est difficile d’entendre son enfant dire qu’il ne veut pas manger, qu’il déteste son corps ou qu’il a besoin de contrôle. La peur de dire quelque chose de blessant ou d’aggraver la situation pousse parfois au silence, et l’incompréhension grandit de part et d’autre.

L’enfant, enfermé dans son mal-être, perçoit souvent les inquiétudes parentales comme une intrusion ou une menace. De leur côté, les parents se heurtent à un mur, oscillant entre patience et frustration. Comment parler quand chaque mot semble être mal interprété ? Comment exprimer son amour sans être perçu comme oppressant ? Cette incommunicabilité laisse place à un sentiment d’abandon mutuel, alors même que chacun souffre de l’éloignement.

La peur omniprésente : entre vigilance et angoisse

La peur devient une compagne constante. Peur de voir son enfant s’enfoncer, peur des complications médicales, peur d’une hospitalisation, voire du pire. Chaque repas devient une source d’angoisse, chaque sortie une crainte de comportements à risque.

Certains parents développent une hypervigilance, surveillant le moindre signe, comptant les bouchées, scrutant les moindres gestes. D’autres, dépassés, tentent de relativiser, espérant que la situation s’améliore d’elle-même. Dans tous les cas, la peur épuise et enferme les familles dans un climat de tension permanente.

Trouver du soutien : ne pas rester seul

Face à cette détresse, il est essentiel que les parents sachent qu’ils ne sont pas seuls. L’association Sorelax est là pour écouter, accompagner et orienter les familles qui traversent cette épreuve. Échanger avec d’autres parents, se tourner vers des professionnels, rejoindre des groupes de parole… Toutes ces démarches permettent de briser l’isolement et de retrouver un espace où exprimer ses émotions.

Il n’existe pas de solution unique ni de chemin linéaire pour aider un enfant atteint de TCA. Mais un parent n’a pas à porter seul le poids de cette maladie. En parlant, en partageant et en cherchant du soutien, il est possible d’alléger cette souffrance et d’avancer, pas à pas, vers une lumière au bout du tunnel.

Si vous êtes parent d’un enfant atteint de troubles alimentaires, ne restez pas dans le silence. L’association Soremax est à votre écoute.

Elodie et sa drôle famille

Jeannine et Marc sont les parents d’Élodie, qui a vingt-deux ans. Élodie a une sœur aînée de deux ans et un frère cadet de trois ans. Ils forment une famille anticonformiste et désordonnée, mais avec des liens affectifs solides.

La sœur aînée, Jade, est en surpoids depuis toujours, ce qu’elle vit mal. Malgré de nombreux régimes, elle n’arrive pas à perdre ses kilos en trop et reste constamment angoissée. Un jour, Élodie lui montre comment elle “contrôle” son poids malgré ses excès alimentaires : elle va aux toilettes et vomit en cachette. Cela devient un secret que les sœurs partagent pendant des années, permettant à Jade de stabiliser son poids. Les deux sœurs deviennent de plus en plus proches, partageant le même groupe d’amis et leurs premières aventures amoureuses.

Le frère, quant à lui, ne s’intéresse pas à leurs préoccupations. Pour lui, la nourriture et le poids sont de simples “paranoïas” de filles. Cependant, il veille à ce que ses sœurs n’aient pas de mauvaises fréquentations, une forme de protection qu’il juge nécessaire.

La sérénité familiale est brisée lorsque les parents traversent une crise conjugale majeure : Jeannine découvre que Marc a une liaison avec une collègue depuis presque un an. Ce sont des moments très difficiles, avec des disputes et des cris à la maison. Les trois enfants se rangent entièrement du côté de leur mère contre la trahison du père. D’un commun accord, la mère et les enfants demandent au père de quitter la maison. Seule Élodie reste en contact téléphonique avec lui, malgré la fin de sa relation avec la collègue.

Élodie tente par tous les moyens de réintégrer son père dans la famille, espérant que sa mère lui pardonne. Marc regrette profondément son erreur et fait tout pour se racheter. Cependant, Jeannine reste inflexible et entame les démarches de séparation puis de divorce.

Élodie se retrouve en plein conflit intérieur. Elle aime son père, comprend son repentir, mais ressent aussi la douleur de sa mère et de ses frères et sœurs. De fait, elle devient une sorte d'”ambassadrice” pour rétablir le dialogue familial. Finalement, malgré l’hostilité des autres, elle décide d’aller vivre avec son père. Elle s’entend bien avec lui et constate son repentir sincère. Mais ses tentatives de réconciliation échouent, ce qui la plonge dans l’angoisse et la déception.

Ses relations avec sa sœur et son frère se détériorent également, accentuant son mal-être. Le coup de grâce survient lorsqu’elle apprend que sa mère a rencontré un autre homme qui viendra bientôt vivre avec eux. Se sentant incapable de supporter cette nouvelle, Élodie voit son espoir de réunir la famille définitivement anéanti.

Elle commence à ne plus manger, se contentant de thé et de quelques biscuits par jour. En quelques mois, elle devient extrêmement maigre. Alarmé, son père décide de l’hospitaliser avec l’accord d’un médecin, craignant pour sa vie.

Le séjour à l’hôpital dure plus d’un mois. Élodie est alimentée par sonde et reprend suffisamment de poids pour sortir du danger immédiat. Finalement, sa mère et ses frères, bouleversés et se sentant coupables, viennent la voir.

Un médecin recommande à Élodie de suivre une thérapie psychologique après sa sortie de l’hôpital et l’oriente vers Soremax. Élodie se rend au centre accompagnée de son père. Après les premiers entretiens, il est proposé d’impliquer la mère et, si possible, toute la famille avec l’accord d’Élodie.

La mère refuse catégoriquement d’y participer pour ne pas croiser son ex-mari. En revanche, les frères et sœurs acceptent. L’idée est d’offrir un accompagnement familial pour aider Élodie à traverser son traitement. Il devient évident qu’Élodie est la “patiente désignée”, représentant la souffrance familiale issue de la séparation parentale, en parallèle à ses troubles alimentaires et à l’utilisation des vomissements pour gérer son poids.

Nous travaillons avec les membres disponibles : le père, la sœur et le frère, ainsi qu’Élodie. Leur implication sérieuse et leur inquiétude pour elle encouragent Élodie à manger. Nous utilisons notamment un accompagnement pour choisir, préparer et cuisiner les repas, car nous savons qu’Élodie ne peut trouver cet équilibre seule, submergée par ses émotions.

Il faut plusieurs mois pour observer de légères améliorations. Élodie suit attentivement les conseils alimentaires donnés par Soremax et réussit à manger de petites quantités d’aliments qu’elle n’aurait jamais imaginé consommer auparavant. En parallèle, un travail psychologique l’aide à se détacher du sentiment de culpabilité d’avoir échoué à “réunir sa famille”, une responsabilité qui ne lui incombait pas.

Nous abordons ses sentiments d’échec et d’impuissance face à sa dynamique familiale, qui rendent sa vie si pesante. Ce travail se fait sur deux axes : l’approche sensorielle et la prise de conscience liée à la nourriture, aux nutriments, aux saveurs et aux sensations perçues, en plus du travail psychothérapeutique.

Les membres de la famille participent également pour stabiliser leurs liens, bien que la mère refuse toujours de nous rencontrer.

Le travail se poursuit sur ces deux fronts, mais déjà Élodie a repris quelques kilos. Et, vous n’y croirez pas, elle cuisine (et mange) peu, mais de manière saine, légère et appétissante…

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Julie

Julie mène sa vie avec un contrôle total sur ce qu’elle fait et, bien sûr, sur ce qu’elle mange.
C’est une trentenaire très mince qui plaît aux garçons (ses mots), sportive et qui aime bien s’habiller. Elle a étudié la comptabilité et, au moment de choisir entre continuer ses études ou travailler, elle décide de se donner une année de liberté pour voyager loin, en Extrême-Orient, ce qui est son rêve.
Elle voyage presque toujours seule, parfois avec d’autres personnes rencontrées lors des étapes intermédiaires de ses pérégrinations. Souvent, elle prend des risques dans les villes ou les zones pas particulièrement sûres, mais elle n’a pas peur, elle se sent capable de s’en sortir.
Le véritable défi pour elle, c’est la nourriture : elle mange très peu d’aliments, toujours les mêmes, et lors de ses voyages, elle n’arrive pas toujours à maintenir son contrôle. Elle perd quelques kilos pendant son voyage, mais les difficultés liées à la nourriture sont compensées par les merveilleux endroits qu’elle visite.
À son retour, elle sent qu’il est préférable pour elle de travailler plutôt que de poursuivre ses études et elle est embauchée par un comptable dans sa ville.
Julie est précise, ordonnée et fiable. En peu de temps, elle est appréciée par son patron et ses collègues plus âgées, et devient la mascotte du petit groupe de collaborateurs.
Elle a toujours eu des petits amis mais ne se sent pas prête pour une “relation sérieuse” ni pour une famille. Pour Julie, la famille équivaut au mariage et aux enfants, mais elle ne veut pas se marier et, bien qu’elle aime les enfants avec lesquels elle joue souvent, elle ne se sent pas “prête”.
Julie est fille unique, elle vit avec ses parents et leur relation est bonne. Elle se confie souvent à sa mère et son père est adorable, courtois et attentif aux besoins de sa fille.
C’est une famille très unie, bien intégrée dans la communauté du village : son père est bienfaiteur à l’église, sa mère aide les enfants à faire leurs devoirs à l’école paroissiale et Julie chante dans la chorale de la ville.
La seule inquiétude des parents concerne le poids de Julie, toujours mince et filiforme. Ils ont tenté pendant des années de la faire manger, surtout en diversifiant son alimentation, mais en vain. Ils ont maintenant renoncé à l’idée que leur fille mange autre chose que quelques légumes et un peu de riz blanc chaque jour, sans jamais varier. De plus, elle prépare elle-même sa nourriture, la cuisine et mange séparément de ses parents, en prétextant qu’elle mange lentement tandis qu’eux mangent trop vite !
Elle boit uniquement de l’eau d’une marque particulière, dont elle garde une grande réserve par crainte de manquer, car l’eau du robinet est pour elle “polluée”.
Si Julie ne parvient pas à suivre son “rituel” alimentaire, c’est un désastre. Elle devient agressive jusqu’à ce qu’elle retrouve le contrôle.
Au bureau, elle mange ce qu’elle apporte de chez elle et ne mange jamais avec ses collègues. Elles connaissent son “rituel” et la laissent tranquille, car pour le reste, c’est une fille sympathique et courtoise.
Pour se rendre au bureau, Julie utilise son scooter et est toujours prudente, mais un jour, elle est renversée par une voiture qui ne lui cède pas le passage à un croisement. L’accident est assez grave : Julie se fracture le poignet et la cheville droite, en plus de subir quelques blessures au visage dues à la vitre brisée du scooter.
Elle est secourue et emmenée à l’hôpital de la ville, sous le choc, bien sûr, et vous pouvez bien imaginer l’angoisse de ses parents qui accourent immédiatement auprès de leur fille.
Mais plus que les blessures corporelles, Julie souffre de devoir manger ce que l’hôpital prépare pour tous les patients… Elle demande à avoir “sa nourriture”, mais cela lui est refusé, et elle se dispute avec les infirmières, hurlant qu’elle DOIT MANGER ses propres aliments et pas ceux de l’hôpital !
Le résultat : un psychiatre est consulté et lui administre des médicaments (par injections) afin qu’elle ne puisse pas refuser les pilules.
Julie est désespérée, elle ne mange pas pendant plusieurs jours, hurlant de ses dernières forces, mais en vain.
L’hospitalisation se prolonge en raison de ses blessures assez graves et Julie perd beaucoup de poids, malgré les invitations d’abord courtoises, puis pressantes, à manger quelque chose. Ses parents proposent de préparer “sa nourriture” et de la lui apporter, mais l’hôpital refuse.
Une fois que Julie est stabilisée sur le plan orthopédique, elle se retrouve en psychiatrie car les médecins sont maintenant très inquiets pour son “anorexie”.
Outre les médecins, avec qui elle a des affrontements verbaux, elle voit également la psychologue qui comprend bien le tourment et l’angoisse de Julie concernant la nourriture, et c’est elle qui lui propose, dès qu’elle pourra sortir, de contacter Soremax pour son problème “alimentaire”.
Les parents font tout leur possible pour la faire sortir dès que possible du service psychiatrique et, au final, ils réussissent dans leur objectif, espérant que Soremax pourra vraiment faire quelque chose pour leur fille.
Lorsque nous la rencontrons, elle boite visiblement et a une cicatrice au visage. Elle est très en colère et définitivement sous-poids.
Au début, nous valorisons son “rituel alimentaire” fait de légumes et de riz blanc, étant donné qu’il est pour elle, à ce moment-là, intouchable. Cependant, nous l’interrogeons sur le fait qu’elle ne puisse pas manger d’autres aliments ni boire autre chose que son eau. La réponse est forte et claire : parce qu’ils sont empoisonnés !
Coup de théâtre, Julie considère que les légumes et le riz blanc qu’elle prépare sont les seuls aliments non empoisonnés qu’elle peut consommer. Il est donc logique, de son point de vue, qu’elle mange ce qui ne lui fait pas de mal, ce qui ne l’intoxique pas.
Le travail de Soremax repose sur deux “aspects” qui s’intègrent mutuellement : la partie psychologique lors des séances individuelles ou de groupe pour donner la parole à Julie et reconstruire, dans la mesure du possible, l’origine de sa souffrance profonde.
Le deuxième aspect consiste à rapprocher la personne de la nourriture dans une expérience retrouvée. L’idée principale est très simple mais efficace : la grande majorité des personnes souffrant de “troubles alimentaires” vit la nourriture comme une menace, un conflit et/ou un poison dans les cas les plus graves.
Il est essentiel d’accompagner la personne à “découvrir” les couleurs, les saveurs, les odeurs et la texture des aliments, sans jamais la forcer à les manger. C’est une perspective très différente où le poids, les calories, les graisses et les sucres ne comptent pas pour laisser place à la nouveauté de découvrir les aliments et retrouver le plaisir de se nourrir. Facile à dire, évidemment, surtout pour des personnes qui ont lutté pendant des années avec la nourriture perçue comme menaçante, mais un chemin thérapeutique qui a donné d’excellents résultats selon notre expérience. Il faut aussi dire que ce parcours, qui nécessite du temps et beaucoup de patience, se fait sans jamais juger les personnes ni les pousser à “manger”…
Il est également très utile d’impliquer les personnes dans le choix et l’achat de la nourriture, dans un accompagnement respectueux et empathique dont elles ont un besoin extrême.
Ce “protocole” nous a permis de faire en sorte que Julie accepte doucement d’essayer de petits ingrédients à ajouter à “sa nourriture standard”, sans aucune obligation de tout manger.
Cette liberté permet à Julie de “garder encore sous contrôle” la nourriture tout en redécouvrant (ou découvrant) des goûts et des saveurs inconnus depuis peut-être trop d’années. Le test PCS que nous proposons aux personnes nous permet de mieux comprendre quels aliments ou ingrédients sont vécus comme “menaçants”, dangereux et impossibles à manger et de proposer en conséquence des “dégustations” pour tenter de briser le cercle vicieux dans lequel la personne s’est enfermée. C’est un travail artisanal et personnalisé, et il ne pourrait en être autrement, car chaque personne a sa propre histoire, des nœuds émotionnels non résolus, des besoins et des peurs.
Julie est en train de tester notre protocole, sans courir mais avec cette petite curiosité qui est un puissant moteur de transformation…

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Silvie

Silvie ne montre certainement pas ses 35 ans, elle a l’apparence d’une jeune fille innocente, mince, jolie et sympathique.
Quand elle était petite, elle avait un frère imaginaire, qui était un chanteur célèbre.
Silvie rêve toujours les yeux ouverts d’être une diva à grand succès et d’être acclamée par tous parce qu’elle est la plus belle et la plus talentueuse, ou bien de faire des choses extraordinaires qui lui procurent une grande célébrité. Elle est musicienne, chanteuse… son objectif est la reconnaissance universelle.
Elle nous parle de sa famille : son père s’occupait de l’organisation des itinéraires dans une entreprise de transport où il a travaillé pendant 30 ans.
Il était rigide et sévère, mais aussi un père merveilleux : il avait surtout une entente spéciale avec elle. Quand il faisait un cadeau à sa femme (par exemple pour son anniversaire), il avait toujours aussi un cadeau pour elle.
Il est mort soudainement d’une crise cardiaque quand Silvie avait 20 ans : sa vie, qui était magnifique, a changé du jour au lendemain.

Elle raconte la circonstance de la mort de son père : elle rentre chez elle joyeuse après une belle journée et son frère, avec un air effrayé, lui dit « Papa est parti ! » Elle ne comprend pas et lui demande « Où ? »
Silvie a eu beaucoup de mal à réaliser qu’il était mort.
Elle avait toujours été convaincue que ses parents s’aimaient profondément et s’entendaient bien, mais peu de temps après, sa mère lui dit que « Ce n’était pas un mariage facile » et elle peine réellement à y croire.
Sa mère avait rencontré son mari dans la même entreprise où ils travaillaient. Silvie dit peu de choses sur sa mère : elle était une excellente maman, mais très attachée à sa propre mère.
À 24 ans, Silvie décide de vivre seule et loue un petit appartement. Vivre seule lui plaît énormément : « Fumer, alcool et garçons ».
Elle fait des petits boulots occasionnels et peu de temps après, elle doit revenir vivre avec sa mère et son frère. Les relations avec son frère, de deux ans de plus, ont toujours été difficiles. Lui était le « génie » de la famille et elle était toujours la « petite dernière ». Son frère a toujours été un enfant agité et agressif, qui mettait les adultes en difficulté avec son comportement. Il se faisait souvent mal, parfois gravement. Haïssable avec tout le monde, mais avec le charisme du leader. Silvie et son frère ont toujours été comme chien et chat. La rupture est devenue totale après qu’il a emporté certains objets de la maison de la grand-mère sans rien dire. Ils ne se parlent plus depuis des années. Lui continue de l’appeler et de lui écrire, mais elle lui raccroche au nez. Son frère vit avec une petite amie et a été un peu adopté par sa famille.

Silvie se souvient qu’elle avait souvent des cauchemars la nuit : elle souffrait de solitude, se sentait exclue, car ses parents dormaient avec son frère d’un côté de la maison, et sa chambre était de l’autre côté, au bout du couloir.
Elle avait un peu souffert du changement de maison survenu quand elle avait 12 ans : avant, elle avait beaucoup d’amis dans la cour, et celle qui est encore sa meilleure amie vivait dans l’immeuble en face. Après son bac, elle a traversé ce qu’elle décrit comme une « dépression absolue » : un trou noir d’apathie totale. Elle en est sortie seule, après quelques mois, sans vraiment comprendre pourquoi.
Silvie a toujours eu des relations sentimentales, mais jamais de grands amours (ses mots) ; ce sont plutôt des liens avec des garçons souvent peu affectueux.
Luca, lui, était mignon et amoureux ; il est encore un cher ami pour elle : adorable, spirituel… mais elle se sentait moche, elle avait pris 15 kilos et se refermait de plus en plus. Luca avait tout essayé pour « la secouer », mais en vain. Après une année difficile, ils avaient décidé d’un commun accord de se séparer tout en restant amis et confidents.
Après sa rupture avec Luca, Silvie pensait peut-être être homosexuelle, mais elle était trop confuse.
Elle décide fermement de perdre du poids, suit un régime très strict qui lui fait perdre beaucoup de kilos, mais puis, soudainement, elle n’y arrive plus, recommence à manger et commence à se faire vomir.
Elle retombe dans la dépression, l’ennui et l’envie de ne plus vivre.
Silvie nous parle ensuite de sa jalousie avec difficulté : elle était jalouse de tous ses copains, voyait des regards complices de ses petits amis avec d’autres filles, mais souffrait en silence de peur de perdre le garçon avec qui elle était.

Actuellement, elle travaille dans une agence de publicité où elle a été récemment embauchée en CDI, ce qui la rend fière, mais la charge de travail est excessive et elle perd six kilos en deux mois. Comme elle se gave le soir, elle recommence à se faire vomir tous les jours, mais elle se rend compte que c’est un « jeu » dangereux dont elle ne parvient pas à sortir seule.
Sa vie est centrée uniquement sur manger et vomir, entrecoupée seulement par les longues heures de travail où elle ne touche à rien, pas même un verre d’eau.
Elle est envoyée à Soremax par son médecin généraliste, qui a hospitalisé son petit ami actuel pour abus d’alcool. Les premières séances de thérapie se concentrent sur sa relation avec son petit ami actuel, totalement absorbé par l’alcool et la drogue, et qui la traîne de plus en plus vers le bas.
Silvie nous dit que « Être la petite amie n’est pas la même chose que d’être une croix rouge ». Elle reconnaît en effet qu’elle a toujours vécu en s’occupant beaucoup des autres et peu d’elle-même et de sa propre vie. C’est un petit moment de prise de conscience qui la fait réfléchir à sa relation actuelle, qu’elle décrit comme « … Absurde et malade ».
Avec difficulté, elle décide de ne plus se consacrer à son petit ami pour « reprendre sa vie en main ». Elle décide de quitter ce travail qui la stresse trop pour aller travailler dans une agence de voyages avec des horaires beaucoup plus « normaux ».
Non seulement cela, mais elle se rapproche à nouveau de Luca, son ancien petit ami et la seule personne « normale » et sincèrement attachée à elle.
Ils recommencent à se voir, et rien que cela « stabilise » un peu Silvie, qui a vraiment besoin d’être accompagnée sur le thème de la nourriture : choix des aliments, quantités et associations pour réussir à « garder » ce qu’elle a mangé sans devoir se faire vomir. C’est un travail complexe qui se fait en collaboration avec Soremax, étape par étape. Nous sommes convaincus que la récupération du plaisir de manger, qui passe par le goût, la couleur, la saveur et l’odeur, est essentielle pour toute personne qui vit la nourriture comme un ennemi, un poison et une source de conflit. Silvie « découvre » la nourriture d’une manière différente de celle qu’elle connaît depuis trop d’années. Elle est étonnée de goûter des « nutriments » qu’elle n’aurait jamais choisis par elle-même et qui ne déclenchent pas immédiatement en elle le besoin de se faire vomir. Le travail continue, il faut du temps, car il n’est pas possible de précipiter des étapes qui passent par une prise de conscience lente et progressive, mais c’est la seule voie pour retrouver une relation avec la nourriture aussi saine et normale que possible.

Le texte est rédigé dans le respect du Code de la Privacy – RGPD – Règlement UE 2016/679



Témoignage de Corinne


J’ai été anorexique vers l’âge de 14 ans, suite à une réflexion de la part de ma mère mais je pense qu’elle était déjà présente latente. Je me suis retrouvée avec un poids de 32 Kilos toute vêtue, je refusais toute nourriture et lorsque j’avalais un peu plus,  j’allais me faire vomir.  Le docteur a décidé une hospitalisation urgente, un mois enfermée à l’hôpital sans aucune visite encore moins  celle de ma mère. Je suis sortie avec un poids qui me maintenait  en vie . L’anorexie a duré jusqu’à l’âge de 45 ans avec des crises de boulimie . Je me donnais au sport et a 23 ans j’ai passé un brevet d’état d’éducateur sportif , je continuais mes crises avec prise de laxatifs , un cauchemar que je gardais pour moi , un lourd secret. J’ai eu trois enfants le seul moment ou j’allais bien ; mes grossesses. Anorexie , je me sentais connecter avec des sources spirituelles , j’avais  développé le dessin, l’écriture , je travaillais trés bien à l’école une forme d’intelligence se développait. J’ai honte de dire qu’il m’arrivait d’être merveilleusement bien , sereine. Lorsque mes crises arrivaient j’avais l’habitude de dire la “petite voix du diable” car mon mental me torturé  atrocement , il me fallait vomir vomir et encore vomir. A l’âge de 30 ans j’ai commencé à faire du Yoga , je me suis sentie connecter à mon corps et pendant une dizaine d’années , je me suis orientée vers l’étude du Yoga , il m’a sauvé la vie , je trouvais le moyen de me comprendre , de m’accepter ,  de faire un lien entre le corps physique , le corps émotionnel et surtout de faire un gros travail sur moi même . Aujourd’hui  je suis enseignante de Yoga et Psychopraticienne en psychosomatique, je ne crois pas au hasard , la vie est faite de rencontres, d’obstacles qui nous permettent d’évoluer vers le mieux . 

J’ai toujours un rapport particulier avec la nourriture, je ne suis plus anorexique ou boulimique mais il y a encore une limite que je ne dois pas dépasser je le sais. J’ai fait de l’anorexie une amie plus du tout  une rivale et ca m’a aidé à la vaincre . le Yoga, differents sports sont toujours mes armes de guérison surtout le Yoga e la méditation.

Mon souhait serait d’être un soutient à toutes les personnes anorexiques par mon témoignage, mon vécu, mes pratiques. Corinne Satya Granet


© Photo de Corinne


Giulia et la taille 38


Je souhaite présenter un aperçu d’un travail de groupe lors d’une séance très importante pour Giulia, une jeune fille décidément « sous-poids » qui rêve de devenir mannequin.

Giulia raconte un épisode récent : « Vous savez que faire mannequin et travailler dans la mode est ce que je veux faire, mon rêve… il y a quelques semaines, il y avait des défilés à Paris et j’ai perdu des opportunités avec certains stylistes pour une raison que je trouve absurde ! C’est-à-dire qu’en allant à l’audition, ils ont découvert que la taille 38 me tombait trop grande et que les vêtements tombaient de tous les côtés. Alors, au lieu de les maintenir avec des épingles, ils m’ont dit brutalement qu’ils prendraient une autre fille et pour moi, c’est inconcevable ! »

Giulia, qui a commencé à pleurer entre-temps, gesticule nerveusement et parle de manière agitée et confuse, presque incompréhensible, répétant sans cesse que ce qui s’est passé n’a aucun sens, qu’en regardant les défilés de Paris, toutes les mannequins sur le podium étaient extrêmement minces, donc il est impossible qu’elle ne convienne pas. « C’est absurde ! C’est vrai que mes amies mannequins ont un peu plus de formes que moi, peut-être un peu de poitrine, ou une taille un peu plus marquée… mais… je voudrais une preuve concrète que je ne vais pas bien, sinon je n’arrive pas à y croire ! »

Les autres filles du groupe affirment timidement que peut-être c’est sa vision de la réalité qui est déformée, parce que les mannequins ne sont pas toutes maigres, alors qu’elle aspire uniquement à devenir de plus en plus mince.
La jeune fille réplique qu’être mannequin et ballerine a toujours été son seul objectif, que les mannequins représentaient pour elle l’idéal à atteindre, « D’abord parce qu’elles étaient belles, ensuite parce qu’elles étaient grandes, et enfin parce qu’elles étaient des os… Mon Dieu, je n’ai jamais dit ces choses à haute voix ! »
Toujours en pleurs, Giulia répète que devenir mannequin était l’objectif qu’elle s’était fixé depuis qu’elle était enfant, lorsqu’elle défilait devant le miroir avec les chaussures à talons de sa mère, et tout au long de son adolescence, où elle remplissait des carnets entiers avec ses rêves de succès futurs dans la mode et la danse. Jusqu’au moment où, dans ces carnets où elle racontait avec enthousiasme ses projets, mais aussi sa vie de l’époque, avec ses loisirs, ses amitiés et ses premières histoires d’amour typiques de cet âge, se sont peu à peu remplacées les listes des aliments qu’elle avait consommés pendant la journée, et le sujet principal, voire unique, dont elle écrivait était devenu la nourriture.
La jeune fille se souvient que dans l’agence pour laquelle elle travaillait, on lui avait dit que son corps était « trop musclé » et que pour défiler, elle devait être plus mince. Lors d’une audition de danse, elle avait été rejetée parce qu’elle était « trop grosse ».
« Tout ce que je voulais, je l’ai obtenu quand j’ai perdu du poids ! Et pour moi, c’était une preuve tangible que c’était le bon chemin ! J’ai toujours pensé que dès que je serais mince, je pourrais faire ce que j’ai toujours voulu, et maintenant on me dit que je ne vais plus ! Même mon agent m’a dit que si je veux travailler dans la mode, je dois être au moins en taille 38, mais je ne veux pas prendre de poids si après… »

Sara lui dit : « Mais si tu es venue ici au groupe de thérapie, si tu as décidé de te soigner, ça veut dire que tu as eu peur, que tu te rends compte que tu vas mal… »
Giulia répond : « Oui, je me sens malade dans ma tête, je me souviens de m’être effrayée quand j’ai réalisé comment mes carnets avaient changé avec le temps et je me souviens d’avoir appelé Soremax le jour après les avoir relus… et puis je sais que j’ai des comportements qui ne sont pas normaux… pour ma relation avec la nourriture, qui n’est pas comme celle des autres, pour toutes mes manies, mes obsessions… mais si on me demandait “Veux-tu perdre 10 kilos ?”, je répondrais tout de suite oui, “Et 15 ?” je répondrais toujours oui, comme ça, si je prends 5 kilos, je serai toujours en-dessous de ces 10 que j’avais perdus avant ! »

Federica lui demande : « Mais es-tu heureuse ? » Giulia secoue la tête.
Federica et Alessandra expliquent à Giulia qu’elle doit penser uniquement à comment elle se sent et à ce qui la rend heureuse, que guérir et recommencer à manger signifierait pouvoir faire ce qu’elle aime. Giulia réplique que manger la fait se sentir mal, ça lui « brûle le ventre ».
Federica ajoute : « Mais c’est parce que tu n’y es plus habituée ! On ne te dit pas de tout reprendre comme avant d’un coup ! Tu pourrais recommencer petit à petit à manger quelque chose que tu ne manges pas actuellement et peut-être prendre ces deux kilos qui te permettraient de rentrer dans la taille 38 pour pouvoir travailler dans la mode comme tu le souhaites… »

Giulia : « Mais si je mange, je prends du poids ! JE PRENDS DU POIDS ! J’assimile tout, je gonfle ! Je le sais déjà ! J’ai déjà essayé ! Je me sens pleine à craquer et je ne peux plus rien faire, ni danser, ni étudier, ni faire quoi que ce soit ! Je ne peux rien manger pendant la journée ! Si c’est minuit, oui, parce que je vais dormir, mais pendant la journée, je ne peux absolument rien manger… J’ai la tête dans le ventre ! C’est-à-dire que si mon ventre est plein, c’est comme si je n’avais plus rien dans la tête ! »

Le thérapeute intervient : « Giulia a bien décrit sa grande peur, si elle mange quelque chose, elle perd le contrôle et prend du poids, mais ce n’est pas seulement quelques centaines de grammes, elle devient une baleine en un rien de temps ! »

Voici la véritable peur, voire l’horreur, d’une jeune fille qui est maintenant habituée à l’anorexie restrictive, c’est-à-dire prendre du poids et, perdant le contrôle qu’elle avait auparavant, ajouter des kilos aux kilos sans pouvoir s’arrêter et donc se « voir » grosse, énorme et déplaisante.

Giulia fixe intensément le thérapeute et semble touchée par ce qu’il a dit, puis éclate en sanglots. Les autres filles essaient de la réconforter, mais Giulia semble dévastée, sanglotant elle n’arrive à dire que qu’elle n’en peut plus, qu’elle va mal et se sent finie…
À partir de ce moment-là, Giulia, aidée et rassurée par ses camarades, commence à prendre des compléments alimentaires et mange de petites quantités de nourriture, pour elle impossibles à ingérer auparavant.
Le groupe permet à Giulia d’avoir des repères importants, des filles qui, comme elle, se sont confrontées à la peur de prendre du poids, de perdre le contrôle et de devenir obèses en un clin d’œil.
La séance a représenté pour Giulia un passage essentiel et lui a permis de commencer à affronter la véritable peur de prendre du poids sans contrôle. Grâce à l’expérience, à la solidarité et à l’affection de ses camarades de groupe, elle ne se sent plus seule et impuissante face à la nourriture. Petit à petit, elle se rend compte que la nourriture n’est pas hors de contrôle, qu’elle peut manger quelque chose sans se lancer dans une course vers l’obésité…


Le texte est rédigé dans le respect du Code de la Privacy-GDPR-règlement UE 2016/679.


Les parents d’Amelie et de Manon

Laure et Eric sont les parents d’Amelie, dix-sept ans, et de Manon, quinze ans.
C’est une famille paisible, où la communication entre les membres est bonne et il n’y a jamais eu de problèmes particuliers au fil du temps. Bien sûr, les deux adolescentes commencent à manifester leur « rébellion » contre l’autorité parentale, mais cela fait partie du processus normal de croissance des jeunes.
Concernant l’école, les deux filles sont très différentes : Amelie n’a pas envie d’étudier, car dès qu’elle le pourra, elle souhaite travailler pour gagner en autonomie et vivre par elle-même. Manon, en revanche, est très studieuse et sait déjà ce qu’elle veut faire plus tard : devenir vétérinaire, motivée par sa passion pour les animaux.
Souvent, les deux filles sortent ensemble avec des amis communs et, dans leur groupe, elles vivent leurs premiers flirts, et toutes deux parlent de leurs petites histoires à leur mère. Un jour, Amelie rencontre un garçon étranger qui fait tout pour être avec elle. Au début, Amelie n’est pas intéressée, mais la persévérance du garçon finit par la faire céder.
Amelie et le jeune homme se fréquentent pendant plusieurs mois, et Manon apprend que le garçon fréquente de mauvaises personnes et qu’il est ambigu, car il semble également s’intéresser à elle !
Un soir, les deux sœurs ont une dispute assez vive à propos du garçon. Amelie pense que sa sœur est simplement jalouse et refuse de croire ce que Manon lui dit pour la mettre en garde. La confrontation est violente, Amelie allant même jusqu’à dire que dès qu’elle en aura la possibilité, elle ira vivre avec le garçon.
Pour la première fois, la famille est confrontée à un conflit entre Amelie, la mère, la sœur et le père. Amelie refuse d’écouter qui que ce soit et est déterminée à aller vivre avec le garçon, d’autant plus que dans quelques semaines, elle sera majeure et il sera impossible de l’en empêcher.
Comme elle l’avait annoncé, Amelie quitte la maison, au grand désespoir de toute la famille, surtout de Manon, qui se sent à la fois coupable et responsable de ce qui est arrivé à sa sœur. De plus, Amelie répond difficilement aux appels et aux messages de ses parents, et elle est très en colère contre sa sœur, à tel point qu’elles ne parviennent plus à se parler.
Manon est profondément affectée par le départ de sa sœur. Elle manque parfois l’école, se montre démotivée et mange peu, se plaignant toujours de maux d’estomac et de difficultés à digérer.
En peu de temps, Manon perd beaucoup de poids, ne se nourrissant que de quelques barres protéinées pour éviter de s’évanouir, et elle est franchement déprimée.
Les parents sont très inquiets et, par l’intermédiaire de leur pharmacien de confiance, ils entendent parler de Soremax.
Ils nous contactent, pleins de douleur et de déception face à ce qui arrive à leurs filles : l’aînée, qui a quitté la maison pour vivre avec un garçon dont ils ne savent que très peu de choses, et qui semble très peu fiable, et la cadette, en pleine anorexie et dépression.
Nous rencontrons deux personnes tristes, épuisées, blessées, qui se sentent totalement impuissantes face à leurs filles, qu’elles aiment tant et qu’elles ne « reconnaissent » plus.
Le travail avec les parents passe par ce sentiment d’impuissance, de culpabilité et de colère, très dangereux car il les empêche d’agir, de proposer des solutions et de se libérer des éventuels chantages émotionnels de leurs filles.
Nous travaillons d’abord sur le sentiment de culpabilité des parents, qui se manifeste par cette question tragique : « Qu’avons-nous (en tant que parents) fait de mal avec nos filles ? »
Absolument rien, Laure et Eric, être parents est un métier extrêmement difficile, sans aucune garantie de réussite !
Dans ce cas, nous ne pouvons pas dire que Laure et Eric ont été de mauvais parents, distants émotionnellement. Au contraire, ils ont toujours été attentifs, présents et ouverts au dialogue avec leurs filles. Un dialogue qui a perduré jusqu’aux premiers flirts des filles, toujours des moments « explosifs » en raison de la sexualité qui se manifeste chez les jeunes.
Pour Amelie, la rencontre avec ce garçon a provoqué un « séisme » émotionnel, qui a conduit à une séparation avec sa famille, perçue comme un obstacle à ses choix de vie.
Prendre conscience de cela permet à Laure et Eric d’atténuer leur sentiment d’impuissance, de réduire la déception (et la colère) qu’ils ressentent face à la situation actuelle. Nous convenons avec Laure et Eric d’adopter une position ferme mais « civilisée » avec Amelie : c’est sa vie et elle doit faire ses propres expériences, y compris avec ce garçon.
En pratique, il s’agit d’« alléger » la tension avec Amelie pour maintenir un canal de communication ouvert entre elle et sa famille.
Quant à Manon, nous proposons aux parents une thérapie pour elle, car elle a très mal vécu le départ de sa sœur et se sent coupable à cause de leur violente dispute au sujet du garçon d’Amelie.
Nous tentons aussi une démarche audacieuse en demandant aux deux sœurs de se rencontrer en notre présence pour tenter une « réconciliation ». C’est une tentative risquée, nous en sommes conscients, mais nous la proposons tout de même. Le projet échoue, Amelie n’est pas prête, et rien ne se passe.
Nous poursuivons le travail pendant plusieurs mois, jusqu’à un tournant inattendu : Amelie nous demande de parler avec elle. Nous acceptons sans hésiter, curieux de savoir ce qui a poussé la jeune fille à faire cette demande. L’Amelie que nous rencontrons est triste et anxieuse, car son petit ami sort souvent le soir avec ses amis sans l’inviter, et il reçoit de nombreux messages d’autres filles, ce qui la rend extrêmement jalouse.
En peu de temps, Amelie commence à voir les paroles de Manon sous un tout autre jour : elles ne venaient pas de la jalousie, mais d’une sincère inquiétude pour sa sœur.
Une série de rencontres s’ensuit, où nous essayons de rester aussi « neutres » que possible, afin de permettre à tous les membres de la famille d’exprimer leurs préoccupations, leurs attentes, et même leur colère face aux événements. Nous reproposons une rencontre entre les deux sœurs, dans un contexte totalement différent. Nous pensons qu’il serait utile que les deux filles se rencontrent sans notre présence, qui serait maintenant inutilement encombrante.
Amelie et Manon nous disent que la rencontre a été très bénéfique, émouvante, et a marqué le début d’un processus de clarification et de réconciliation, souhaité et espéré par les deux.
De plus, Manon est désormais absolument convaincue qu’elle ne veut plus jamais revoir le garçon qui l’a fait souffrir (avec sa propre « complicité »), avec qui elle devra cependant encore faire face. Les deux sœurs rentrent ensemble à la maison, à la grande surprise et à la joie des parents ! L’unité familiale peut se reconstituer, sans reproches, mais avec un fort désir de regarder vers l’avenir, tous ensemble.
Mis à part quelques tentatives désagréables de l’ancien petit ami de Manon de reprendre contact avec elle, que la jeune fille gère avec le plein soutien de sa famille, la situation familiale s’apaise.
Les axes du travail thérapeutique maintenant consistent pour Amelie à se confronter à son désir d’émancipation familiale sans pour autant avoir encore les « outils émotionnels » nécessaires pour éviter de tomber dans des situations comme celle vécue avec le garçon peu fiable.
Pour Manon, le travail porte sur les nombreuses émotions liées à sa culpabilité d’avoir informé sa sœur de ce qu’elle savait sur le garçon, bien que ce fût dans un but bienveillant, et sur la violente dispute qui a suivi et qui a brisé l’alliance et la complicité entre les deux sœurs.
La reconstitution du cadre familial permet également à Manon d’aborder la nourriture de manière plus saine. Elle recommence lentement à manger et retrouve un poids plus approprié.
Lors d’une des séances, Manon nous dit que son refus de manger était à la fois une punition pour avoir fait souffrir Amelie, mais aussi un moyen de devenir moins attirante pour les garçons, perçus comme des « prédateurs » et peu fiables, qui, bien sûr, ne prêteraient pas attention à une fille toute peau et os…!

Le texte est rédigé dans le respect du Code de la vie privée-GDPR-règlement UE 2016/679.

Anna et son passé

Anna est une jeune Italienne de 28 ans qui vit en France, à Nice, depuis quatre ans. Dès l’époque de l’université, elle a toujours été très photogénique, au point de pouvoir payer son loyer et ses études grâce à des séances photo qui lui permettaient de subvenir à ses besoins sans difficulté. Pendant un certain temps, elle avait envisagé de se lancer dans le monde du spectacle, mais elle a sagement choisi d’investir dans des études universitaires en langues étrangères.

C’est justement au cours de ses études à l’Université pour étrangers de Pérouse qu’Anna a rencontré Vincent. Une étincelle s’est allumée entre les deux jeunes gens et, à la fin des études de Vincent en Italie, Anna a décidé de le suivre à Nice, où ils ont commencé à vivre ensemble.

Ce furent des années épanouissantes tant sur le plan relationnel que professionnel, jusqu’au moment où ils ont sérieusement pensé à avoir un enfant. Anna tombe rapidement enceinte et la grossesse se déroule sans difficulté. Une petite fille est née et le couple est sur un petit nuage de bonheur. Au début, la ville de Nice, agréable et riche en services pour un couple avec un jeune enfant, se révèle fatigante à la longue, au point que le couple décide de s’installer dans un village à une trentaine de kilomètres de Nice. Le télétravail leur permet de gérer au mieux ce déménagement, heureux de leur petite mais charmante maison avec un jardin.

Malgré la joie d’avoir leur fille, Anna souffre de la prise de poids importante qu’elle a accumulée pendant la grossesse, un poids qu’elle n’a pas réussi à perdre dans les mois suivants. Anna accorde toujours beaucoup d’importance à son apparence physique et se rend compte que cet excès de poids la fait mal vivre son rôle de femme et de mère. Elle en parle à Vincent, qui au début sous-estime sa souffrance, mais finit par comprendre que c’est un sujet trop délicat et douloureux pour sa compagne.

Anna essaie plusieurs régimes sans succès, car elle a toujours faim, bien qu’elle sache qu’elle mange souvent par ennui. Elle décide de consulter un nutritionniste qui lui propose un plan très soigné et personnalisé, mais elle ne parvient à le suivre que pendant quelques mois, ce qui la déçoit beaucoup. Désespérée, Anna discute un jour avec sa petite sœur, qui lui propose un vieux « truc » : « … Mange ce que tu veux et ensuite va vomir, sans que Vincent ne te voie. Au début, ce n’est pas facile, mais ensuite tu y arriveras sans problème… »

Anna n’y avait jamais pensé, et elle trouve l’idée géniale : elle pourra manger, vomir ensuite, et ainsi retrouver son corps et se regarder sereinement dans le miroir. En peu de temps, son poids semble redevenir presque normal. Anna se sent forte et « gagnante », puisqu’elle ne fait de mal à personne !

Ce « truc » fonctionne pendant plus d’un an, jusqu’au jour où Vincent, qui soupçonnait quelque chose, la surprend en train de vomir dans la salle de bain. Un moment très tendu s’ensuit entre eux deux : Anna minimise la situation, mais Vincent est effrayé et conscient de la souffrance de sa compagne. Après une longue nuit de discussions, de clarifications, d’émotions et de pleurs, Vincent propose à Anna de demander de l’aide pour leur couple et ils décident de contacter Soremax.

Les premiers entretiens révèlent un lien de couple fort et authentique. Anna et Vincent s’aiment et sont véritablement complices, en plus d’être des parents attentionnés et affectueux avec leur petite fille. Mais quelque chose de « sombre » transparaît dans les paroles d’Anna lorsqu’elle parle de son adolescence : elle a toujours été une très belle jeune fille, grande, sportive, dynamique, avec une grande envie de vivre et de voyager.

Nous tentons, non sans difficulté, d’approfondir certaines expériences fortes de son passé. Vu la délicatesse du sujet, nous préférons voir Anna séparément de Vincent. La thérapie psychologique n’est pas une question de voyeurisme, mais de prise de conscience de son propre parcours personnel. Anna nous dit : « … Pendant une certaine période, j’ai consommé des drogues légères, de l’alcool et j’ai eu des relations sexuelles avec des garçons rencontrés au cours de mes voyages en Europe… »

Dans cet espace protégé, Anna se souvient d’un épisode avec un garçon rencontré lors d’un voyage en Europe du Nord. Elle ne se souvient pas bien, sa mémoire la trompe peut-être, mais quelque chose de grave s’est manifestement produit. Les effets en sont clairs : pendant quelques mois après ce voyage, elle était très nerveuse, irritable et agressive. Surtout, elle avait arrêté de manger, jusqu’à l’aménorrhée, et elle ne voulait plus être touchée par aucun garçon. Avec difficulté, elle se souvient qu’un garçon l’avait forcée à une relation sans son consentement. Par peur, elle avait laissé faire, mais ensuite elle s’était sentie très mal et… elle se souvient maintenant, elle avait vomi toute la nuit, terrorisée et dégoûtée.

La honte l’avait empêchée de parler de cet incident avec sa famille et ses amies, qui l’avaient pourtant mise en garde contre des comportements trop « désinvoltes » avec des garçons tout juste rencontrés. Maintenant, Anna peut et doit travailler sur ce traumatisme, et surtout sur ses conséquences. C’est à elle de rompre le silence, et elle décide d’en parler à Vincent. C’est un récit douloureux et émouvant, ponctué de pleurs, qu’Anna partage avec Vincent. Il en est profondément touché et réagit en l’enlaçant très fort, renforçant encore leur lien.

Brisant enfin le terrible secret de cet épisode et d’un passé qu’elle aimerait effacer, qu’elle ressent comme un fardeau qu’elle doit partager avec Vincent, Anna passe des semaines qu’elle décrit comme étant en état de catatonie. Elle se sent éteinte, sans énergie psychologique, tandis que Vincent l’aide beaucoup, prenant en charge presque totalement leur fille.

Après plusieurs semaines d’anorexie, Anna commence lentement à manger à nouveau, mais elle est terrifiée à l’idée de ne pas pouvoir « garder » la nourriture et de devoir courir aux toilettes pour vomir. Pour répondre à cette peur, nous lui proposons un accompagnement axé sur la nourriture : le choix de ce qu’elle va manger, la préparation par Anna elle-même, la cuisson et ensuite… le repas à table, sans prêter attention aux calories, aux sucres ou aux quantités. Cela est fait pour aider Anna à redécouvrir le plaisir de manger, la saveur, la fragrance, le goût, la couleur, et non la quantité, qu’elle associe à l’obligation de vomir pour se « libérer » de ce qu’elle a mangé.

C’est un travail délicat et très personnalisé qui permet à Anna de redécouvrir la nourriture sous un jour totalement différent, comme une expérience gustative et non comme une question de quantité, de sucre ou de calories, des aspects qu’elle ne peut tolérer.

Anna est surprise par cette approche, qui lui permet d’« apprendre » une nouvelle manière de manger, tout en douceur, sans hâte ni contrainte, puisque le poids est la dernière de nos préoccupations, étant plutôt la conséquence directe d’un retour à la sérénité, ce qui peut aussi se refléter sur sa relation avec la nourriture et son bien-être général.

Le texte est rédigé dans le respect du Code de la vie privée – RGPD – règlement UE 2016/679.